Tandis que les rêves guettaient la jeune femme, des bruits finirent par troubler la tranquillité de la maisonnée. Clignant des paupières alors qu’elle commençait à émerger, Amy releva la tête pour réussir à distinguer l’origine du vacarme avant de la reposer sans délicatesse pour l’enfouir plus profondément. Rien n’y fit. Elle avait beau plonger tout au fond de son lit et de se recouvrir d’oreilles, le vacarme d’Elliot – reconnu après les nombreux jurons que ce dernier poussait - était toujours présent. Poudlard lui manquait. S’allongeant sur le dos, elle décala ses cheveux pour pouvoir observer le plafond. Les faibles traits de lumière qui passaient par sa fenêtre et sous la porte éclairaient à peine les murs. On ne pouvait que distinguer les tracés obscurs qui dramatisaient la situation. Qu’importe. Une fois de plus, Amy avait espéré s’éveiller dans son lit dans la salle commune de Serdaigle mais rien n’y fit. Elle pouvait espérer autant qu’elle le désirait, personne ne pouvait remonter le temps pour empêcher cette catastrophe d’arriver. Les mangemorts avaient attaqué Poudlard au beau milieu de la soirée. A cause du bal, tous les élèves étaient déjà présents. Les échos ne pouvaient trahir l’évènement. La peur et la panique avaient pris le pas sur l’euphorie passée. Relevant une main dans les airs, Amy la regardait sans vraiment la voir. Dans la tumulte, elle avait lâché sa main. Elle n’avait pas fait exprès. Etrangement, elle se rendait compte qu’elle n’aurait pas voulu le faire mais c’était trop tard. Ils avaient été séparés à cause de l’angoisse et elle n’avait pas pu le retrouver. Serrant le poing si fort que des milliers de petites fourmis se créèrent dans ses vaisseaux, elle ravala son orgueil. Elle n’avait pas envoyé de missive. A quoi bon. La liste des disparus et des morts avait été publié. Enfin, disons plutôt les condoléances adressées aux proches. S’il n’était pas dedans, il n’y avait aucune chance qu’il est passé le voile. N’est-ce pas ?
Retirant furieusement les draps, la jeune Serdaigle s’assit sur son lit en réprimant un cri de rage. Tapotant sur sa lampe de chevet, elle laissa entrer la lumière dans la pièce pour faire apparaitre une pièce froide à la décoration sommaire. Pour le temps qu’elle était ici, Amy n’avait pas jugé utile de la décorer à son goût. Après tout, qu’aurait-elle pu y mettre ? Elle ne possédait rien. Tout appartenait aux Lockwood, elle le savait bien. Même s’ils la reconnaissaient comme leur fille, qu’est-ce qui lui disait qu’ils ne changeraient jamais d’avis ?! Et si elle les décevait ?! Cette angoisse ne la quittait pas malgré son teint impassible. L’arrivée de cette guerre et de ses conséquences la confortaient dans ses pensées : personne n’est éternel et tout le monde dit au revoir un jour ou l’autre.

Après avoir revêtu un pull et un jean, elle attrapa un élastique tout en coinçant sa baguette dans la poche arrière de son pantalon. Déambulant dans les escaliers, elle attrapa ses cheveux pour les attacher en arrière avant d’arriver dans le couloir du bas. « Si tu cherches les casseroles, elles sont dans le meuble sous les plaques, Rossignol ! » clama-t-elle avant d’arriver elle-même devant la porte de la cuisine. Un bruit de casserole finit par répondre à son appel. « Je le savais. Je cherchais… les couteaux de cuisine, c’est tout ! » se reprit le grand black tout en attrapant les couteaux qu’il venait tout juste d’entrevoir, de mauvaise foi. N’en croyant pas un mot, Amy ne dit pourtant rien et s’assit silencieusement sur l’un des tabourets en calant sa tête entre les paumes de ses mains. « Bien dormi ? » Amy releva son regard jusqu’à lui pour lui répondre. « Comme un loir… jusqu’à ce qu’une Doxy poilue vienne clamer son ignorance avec des placards. » répondit-elle avec un ton des plus sérieux sans décoller son menton de ses mains ce qui mangeait la moitié des mots. « Toujours de mauvais poil au réveil ? Tu sais qu’il existe des potions pour çà. » continua Elliot sans répliquer à son sarcasme. « Pourquoi t’es là ? » continua à maugréer la demoiselle sans prêter gare à ce que venait de dire le jeune homme. Elliot était le neveu de ses parents adoptifs, ce qui faisait de lui son cousin si on chipotait un peu. Plus âgé qu’elle de quelques années, ce dernier avait rejoint les membres de la Brigade Magique à la fin de sa septième année à Gryffondor. Cependant, depuis qu’elle était rentrée, il avait tendance à venir squatter la maison des Lockwood lorsque ceux-ci étaient partis au travail. L’un travaillant au Ministère, tandis que l’autre enchaînait les heures à Sainte-Mangouste, on ne pouvait pas dire qu’ils étaient très présents. Après tout, Amy n’était pas censée être présente à ce moment de l’année. Elliot revenait seulement parce qu’ils s’inquiétaient à cause de ce qui s’était passé à Poudlard. Jamais, au grand jamais, le château n’avait dû fermer ses portes. Et pourtant, c’est ce qu’ils vivaient aujourd’hui. A cause de cet état de crise, aucun des deux parents n’avaient pu prendre des jours de congés, tout au mieux de sortir à l’heure… et encore. Voilà pourquoi Elliot passait régulièrement et aussi à cause de sa nature inquiète. En fait, il en était même venu à habiter dans la chambre d'amis, la fin de son bail coïncidant. Son attardement dans les lieux seul était le résultat de la présence de sa cousine. Après tout, si sa cousine avait vu quelque chose, on pourrait s’en prendre à elle bien qu’elle persistait à avouer qu’elle ne savait rien. Comment aurait-elle pu reconnaître quelque chose d’anormal ou le visage de l’un d’entre eux ?! Cependant, Elliot savait qu’Amy n’était pas non plus un exemple de vérité lorsque les situations l’exigeaient. « Tu t’ennuierais sans moi ! » répondit-il avec un franc sourire et un éclat de rire tandis qu’il tentait de suivre une recette dans un manuel magique. Ce qui n'était pas faux puisqu'elle avait déjà terminé de lire l'ensemble des livres de cours qu'elle avait ramené avec elle. La bibliothécaire avait refusé qu'elle n'en emprunte à cause de la date très incertaine de leur retour. Amy s'ennuyait vite sans livre à étudier. « Allez, laisse-moi faire avant que tu nous intoxiques. » enchaina la jeune fille tout en sautant du tabouret pour pousser son cousin d’un amical coup de fesse. Et malgré la situation actuelle, c’est avec rire et légèreté qu’elle tenta de lui enseigner quelques rudiments…


Après avoir passé toute une semaine enfermée dans la demeure de ses parents adoptifs, Amy en avait eu marre. Bien qu’elle n’était pas une personne des plus bavardes, n’avoir que quelques paroles échangées le soir ne lui suffisaient plus. Surtout lorsqu’elle s’était rendue compte qu’elle avait épuisé son stock de lecture. C’est alors que la missive de Léonard avait éclairé sa journée. Son ami de Poudlard demandait de ses nouvelles – après lui avoir reproché de ne pas en avoir donné en cette période de crise – et lui proposait de sortir dans Londres. Si l’invitation lui paraissait alléchante, Amy n’avait en tête que l’objectif de pouvoir aller à Fleury & Botts et de glaner des informations sur ce qui se passait. Elle détestait ne pas comprendre ce qui arrivait dans ce monde qui était le sien. Bien entendu, l’allusion de revoir son « meilleur » ami n’était pas non plus exclu. Amy n’était pas non plus la fille sans cœur qu’on décrit la plupart du temps. Attrapant son sac et sa veste, elle sortit de la maison tout en claquant la porte derrière elle avant de placer le sortilège de protection le temps de son absence. Il ne fallait pas qu’elle traine de trop car elle n’avait pas mise au courant ses parents adoptifs. A quoi bon ?! Cela les aurait plus inquiété qu’autre chose et Amy n’arrivait pas à être la petite fille sage, attentive et attentionnée qu’ils espéraient avoir. Descendant le chemin qui la menait jusqu’au trottoir, elle aperçut avec surprise Léonard arrivait à son encontre. « On n’avait pas rendez-vous au Chemin de Traverse ? » le questionna-t-elle, inquiète de le voir sur les lieux. « Si… jusqu’à ce que je regarde sur un plan où était ta maison. Tu sais que seulement six patés de maisons nous séparent ?! » lui répondit-il en souriant, les mains dans les poches. « Tu plaisantes ?! Et il va falloir que je te coltine encore après Poudlard ! » s’exclama-t-elle en levant les mains au ciel comme dans une mauvaise comédie musicale. « T’es vraiment une mauvaise actrice ! » enchaina-t-il avec franchise. Un rire franchit les lèvres d’Amy. Tout en s’approchant de lui, elle l’attrapa par la manche pour le tirer. « Allez viens, on y va !

Assis autour d’une bieurraubère au Chaudron Baveur, nos deux compères discutaient allégrement en prenant soin de faire comme si rien ne s’était passé. Pourtant mauvaise comédienne, Amy réussit à se convaincre elle-même qu’il s’agissait d’une journée de congé comme une autre… mais cela ne prenait pas. Ni Léonard, ni elle, n’arrivaient à oublier ce qui s’était passé. Bien qu’ils prennent soin d’éviter de parler de Poudlard ou de n’importe quoi qui puisse être mis en relation avec les derniers évènements, cela ne dura pas très longtemps. Marchant sur le chemin du retour, Léonard finit par poser la question tant redoutée. « Sinon… Tu arrives à dormir depuis… » il ne termina pas sa phrase par gêne d’avoir rompu leur accord muet mais la réponse rapide d’Amy lui indiqua qu’il n’avait rien à craindre. « Comme on peut ! » La jeune fille était devenue aussi loquace qu’à l’ordinaire, soit pas beaucoup. Pourtant, entourée de ses proches, elle était plus ouverte et sympathique. « Et maintenant, on fait quoi ?! » Silence et haussement d’épaules. « On ne va pas faire qu’attendre. Ils ont capturé trois d’entre nous. » « Je sais… » le coupa-t-elle gentiment tout en frissonnant. Elle n’avait pas envie de parler de cela. Elle n’avait pas envie d’y penser. Tout simplement parce qu’ils ne pouvaient rien faire à leur niveau. Ils n’étaient que des élèves et elle n’arrivait pas à comprendre tout ce qui leurs tombaient dessus. Elle se maudissait d’être ignorante. Elle voulait savoir pourquoi. Savoir qui avait raison. Rien n’était blanc, ni noir et pourtant… c’était beaucoup plus simple de se dire qu’il y avait les bons et les mauvais. Amy n’était pas dupe. Ses réflexions d’enfant n’avaient plus leurs places dans ce monde. Sans le vouloir, elle était devenue une adulte trop tôt et elle ne pouvait plus tourner le dos en se réfugiant dans ses rêveries d’enfant. « Que veux-tu qu’on fasse ? Nous ne sommes que des anciens élèves. Pas des aurors, ni des brigadiers. Même eux n’arrivent pas à comprendre ou faire quelque chose. » Amy resserra son emprise sur les livres qu’elle avait acheté avec son argent de poche. Elle l’avait prévu pour autre chose à la base mais elle n’aurait surement plus besoin de prendre un abonnement à la Gazette du Sorcier ou au Chicaneur maintenant. Les médias sont toujours contrôlés. « Je dois te parler de quelque chose… » Indiquant à Amy silencieusement qu’il ne pouvait en parler dans la rue, ils entrèrent chez les Lockwood. Montant dans la chambre de la jeune fille, Amy n’était pas des plus rassurée lorsqu’il lui demande de fermer la porte alors qu’il lançait un assurdiato afin d’être certain que personne ne pourrait les entendre. C’est alors qu’il lui parla d’un groupe d’élèves qui s’étaient réunis pour contrer la menace des mangemorts. Un groupe dans la lignée de feu Albus Dumbledore. Ceux qu’on appellent les pro-ordres… Leur innocence était bien loin derrière eux. Les rênes de leur avenir étaient désormais entre leurs mains.